Art martial atypique, la capoeira est une pratique qui puise ses racines dans la culture afro-brésilienne. Elle est née il y a 400 ans de la lutte des esclaves pour la liberté. S’y mêlent lutte, jeu, danse, acrobaties et musique, mais également toute une culture, un esprit festif, une chaleur et un mode de vie. Echappant ainsi à toute tentative de catégorisation, le seul moyen d’apprendre à la connaître est de la pratiquer. Les instruments – berimbau, pandeiro, agogo et atabaque – et les chants dictent le jeu des capoeiristes dans le cercle qu’ils forment, appelé la roda, qui symbolise le monde et la liberté.
Origines de la capoeira
La capoeira tire ses racines dans l’esclavage des noirs Africains. Entre le XVIe et le XIXe siècle, environ 4 millions de personnes furent déportées de différents pays d’Afrique (Angola, Soudan, Gabon, Congo, Mozambique…) au Brésil, pour y être utilisées comme main d’œuvre entre autre dans les champs de canne à sucre ou de coton.
Bien que les premiers rapports écrits mentionnant la capoeira datent du XVIIIe siècle, plusieurs théories s’opposent pour expliquer les origines de la capoeira :
- Origines Africaines : la capoeira serait basée sur une danse Africaine nommée le NGOLO (Danse du Zèbre, pratiquée dans la région d’Angola). Cette pratique présente de nombreuses similitudes avec la capoeira.
- Origines Brésiliennes : formée sur le sol Brésilien, par des esclaves nés au Brésil et leurs descendants.
- Origines afro-brésiliennes : la capoeira serait une évolution des racines Africaines liée à une pratique multiculturelle (métissage des populations, esclaves provenant d’autres nationalités…).
Quelle que soit la thèse retenue, les esclaves ont dû développer des techniques de combat pour apprendre à se battre, pouvoir survivre, et surtout dissimuler leur lutte car cette pratique leur étaient totalement interdite par les colons.
Origines du mot capoeira
Plusieurs thèses sont défendues, sans que l’une prédomine véritablement. Parmi les plus connues :
- cage ou panier à poules (« capão » signifie « coq » en portugais) (1a) et divers sens dérivés de celui-ci par analogie;
- mot d’origine tupique (Tupi Guarani, indiens du Brésil) qui signifie bois renaissant, après l’abandon d’une culture;
- Jeu athlétique des noirs du Brésil (3a) Individu turbulent et perturbateur (au 19° siècle).
Le jeu de capoeira s’est aussi appelé jogo de mandinga, jogo de São Bento, cungu, vadiação, brincadeira de Angola…
Capoeira, culture et coutumes
Les Africains déportés réussirent également à préserver leurs religions et leurs coutumes, en les adaptant pour tromper le colonisateur. Ainsi le Candomblê est intimement lié au développement de la capoeira. Cette religion est basée sur l’adoration d’un dieu unique, et honore de nombreuses divinités appelées Orixàs (masculin). Les cérémonies se déroulent dans des lieux appelés Terreiros, et emploient notamment chants, et percussions (tambours). On retrouve les influences du Candomblé dans les textes de chansons, ainsi que dans l’usage de certains instruments et dans le rituel de la roda. Malgré ces influences, « la capoeira n’a pas de religion » et se développe partout dans le monde indépendamment de cet aspect.
Désir de liberté
Les esclaves étaient souvent parqués dans des « Senzalas », aux abords des fermes, sans aucune considération d’hygiène et de confort. Ceux qui parvenaient à s’échapper du joug de leurs maîtres formaient ou rejoignaient un « Quilombo ».
Le Quilombo était un territoire libre, établi au fond de forêts inaccessibles, où se réfugiaient les esclaves en fuite. Ils y ont survécu pendant des décennies, dans la clandestinité en développant des rapports communautaires particuliers. Avec la fin de l’esclavage en 1888, les Quilombos ont disparu.
Le plus célèbre d’entre eux, celui de Palmares, dans une région montagneuse du Nordeste. Il résista pendant plusieurs décennies aux attaques incessantes du pouvoir. Zumbi, le chef le plus fameux, fut tué en 1695, lors du massacre qui mit fin à l’existence du Quilombo mais son nom reste toujours lié aux luttes des Noirs et plus généralement des opprimés contre leurs oppresseurs. Le 20 novembre, date de la mort de Zumbi, est devenu le « jour de la conscience Noire » aujourd’hui célébré.
Des milliers de Quilombos se formèrent dans tout le Brésil, certains furent combattus et obligés de résister, d’autres parvinrent à s’insérer dans le contexte social et économique régional. Pendant des siècles ils n’eurent évidemment aucune existence légale et leurs membres furent amenés à vivre isolés.
Indépendance du Brésil et abolition de l'esclavage
De mieux en mieux connue et définie au cours de l’histoire du Brésil, elle survivra jusqu’à l’indépendance du Brésil en 1822 et l’abolition (officielle) de l’esclavage en 1888 mais elle reste tout de même mal vue par l’autorité qui la considère comme dangereuse. Elle est utilisée notamment par des brigands et malfrats de tout genre, réunis en bandes rivales appelés « maltas de capoeira », la capoeira s’employait dans la rue où les « capoeiristas » ou « capoeiras » causaient des désordres car ils l’utilisèrent régulièrement pour régler leurs comptes dans des affrontements sanglants.
Lors de la guerre du Paraguay (1864), le Brésil envoya de nombreux esclaves et condamnés faire la guerre en échange de leur liberté et beaucoup de capoeiristes moururent pour un pays qui n’avait aucune considération pour eux.
En 1890, pour interdire le mouvement de la capoeira en expansion, le Brésil créa un délit punissant ceux qui se rendent coupables de « capoeiragem » : l’exercice de la capoeira. Quiconque était donc surpris à la pratiquer était emprisonné et pouvait être envoyé aux travaux forcés. Ainsi, la capoeira est restée publiquement confidentielle pendant plusieurs décennies et ce statut fut intégré dans ses « codes », les capoeiristes étaient anonymes et connus seulement par leur « apelido » (surnom).